Le bazar de la laïcité : un chantier pour l’éducation populaire - Guillaume Guthleben


© Guillaume Dopus - ne pas se voiler la face |

 

Bazar [ba.zaʁ] 1432

1. Marché public, lieu destiné au commerce.

2. Lieu couvert où sont réunis des marchands tenant boutique.

3. Expression imagée : fourbi, grand désordre.

4. Expression argotique : lycée, lieu où s’assemblent des gens de lettres.

 

 

Pourquoi un tel bazar ?

 

C’est à y perdre son latin (ou son persan ou son arabe) : tout le monde en parle, chacun y met son sens, ses convictions et ses croyances. A tel point que ce mot, laïcité, qui devrait permettre la concorde, alimente plutôt son contraire : la discorde.

 

Est-il un principe, une valeur, une notion, un cadre juridique ? Certains le voient comme un rempart contre l’obscurantisme, d’autres comme un moyen de limiter le regain du religieux, certains comme le garant de leur liberté de conscience, de pratiques et de comportements, d’autres encore comme la sacralisation d’un droit à la différence.

 

Dans la confusion générale, le commentaire des uns provoque la réaction des autres, l’intransigeance engendre la crispation. C’est un brouhaha permanent dans lequel plus grand monde ne s’y retrouve.

 

Et si on prenait vraiment le temps de démêler tout ça ? Sereinement. Posément. Sans éviter les vrais sujets. En assumant les bienfaits de la confrontation. En se collant à la réelle complexité des choses. En acceptant de devoir y réfléchir, se remettre en question, y travailler concrètement. A plusieurs.

 

Car au fond, cette question révèle/réveille des débats que notre république n’a jamais complétement abouti (ou qui sont peut-être à avoir sans cesse)… Comment la société et l’individu agissent ensemble pour l’autonomie et l’émancipation ? Qu’est-ce qui fait commun au-delà de ce qui distingue, au point de fonder une loi commune ? A partir de quel point les inégalités alimentent la conviction que les différences séparent les êtres ? Qu’est-ce qui nous intrigue, nous fascine, nous inquiète dans les relations entre hommes et femmes ? Quelle conception de la famille et sa place dans la société partageons-nous ? Que cache ce besoin de croyances, quelles qu’elles soient ? Pourquoi l’image et le corps cristallisent-t-ils autant les passions ?

 

Autant de questions essentielles à l’éducation populaire : celle que les citoyens élaborent ensemble ; celle qui infuse savoirs et connaissances pour permettre à chacun d’exercer ses droits ; celle qui suscite, fédère et anime des énergies collectives ; celle qui développe des espaces de libertés dans et en dehors des institutions ; celle qui fait siens les enjeux de société et de civilisation pour ne pas en laisser le monopole aux corps intermédiaires, aux appareils bureaucratiques, aux groupes de pressions ou aux représentants d’un parti ou d’une idéologie ; celle qui oblige les élites, représentants associatifs et politiques à être exemplaires et redevables envers la base citoyenne de laquelle ils tirent leur légitimité...

 

Bref, cette éducation populaire en acte qui se saisit de toutes les occasions possibles pour faire lien, sens et commun.

 

C’est le bazar ! On ne sera pas trop d’être plusieurs à se retrousser les manches pour s’y coller.

 

Guillaume Guthleben

 

 

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