Avez-vous déjà entendu cette phrase exprimée en fin de journée de formation ?
Pour ma part, c'est une première !
Tirons le fil ...
Siham en découvrant le programme de la journée s'est projetée dans "quelque chose" de désagréable, et forcément conflictuel.
Quelque chose qui allait sans aucun doute l'obliger à être en désaccord et en opposition ! Bref, elle est arrivée à la journée de formation prête pour le combat. Et puis, chemin faisant; la journée propose :
Une journée construite pour mettre au travail les tensions, non pas dans une logique de combat mais dans une recherche de sens et de liens à nos métiers.
Au fait, c'était quoi le thème de la journée ? "Laïcité et valeurs de la République".
Claire Pfauwadel
Trajectoire Formation
Découverte du thème si compliqué,
Même pas énervée !!
Moi même surprise, étonnée
Je vais enfin pouvoir écouter, échanger et partager
Nouvelle vision ou orientation
Mais attention !
Il reste encore pas mal de friction
Suivi de quelques contradictions
Je reste impatiente de recommencer
Merci à toi la Formation,
C'est ça la Laïcité.
Siham MOUNTASSIR
BPJEPS LTP 2016
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Guillaume Dopus - Léger comme un voile
Ponctuations corporelles - Marie-pierre Jaux
Journée de la laïcité – 19 octobre 2017- Mulhouse
Je m’appelle Marie-pierre Jaux, je suis danseuse interprète, chorégraphe parfois et j’enseigne la danse contemporaine au conservatoire à rayonnement départemental Henri Dutilleux de Belfort. J’interviens également en médiation artistique et culturelle autour de mon art en direction de différents publics, et j’anime régulièrement des moments de formation, des ateliers dans le secteur social, culturel, socio-culturel et de la santé autour du travail du corps en mouvement et plus généralement autour du corps comme outil au service de la relation professionnelle et comme vecteur pour dynamiser une équipe de travail, stimuler une attitude positive, favoriser l’esprit d’équipe, l’enthousiasme, la créativité et améliorer la communication dans les relations.
Le principe de la laïcité et sa compréhension doit nous aider à mieux gérer notre espace de vie, dans une relation de partage attentive et consciente avec les autres citoyens, de mieux respirer ensemble, d’accepter nos différences où tout du moins de ne pas les juger, mais de nous respecter à travers nos convictions, nos idées et nos religions.
L’art de la danse, dont il fût un peu question lors de cette journée par ma présence, mais aussi comme de nombreux autres arts peut aider à favoriser ces positions.
Et si la danse est un art, un art de vivre, même, elle est surtout une manière d'être au monde, de le questionner et de s’en emparer pour un mieux être et un mieux vivre. Les œuvres entretiennent des rapports complexes avec le monde et l’époque dans laquelle elles sont élaborées.
En danse, la question de la différence et de la singularité de chacun se pose dans le bon sens avec respect et sans jugement grâce à l’idée de plaisir et de communication qui la traversent.
L'égalité y est très présente également puisqu’il n’y a pas de notion de compétition. Chacun arrive avec son bagage physique, son imaginaire, son désir et il n’y a pas de justes ou mauvaises réponses car toutes sont respectables dans le sens où tout mouvement peut-être « danse » à partir du moment où l’on a conscience de celui-ci dans l’instant. A partir du moment où l’on est prêt à entrer dans la poésie du mouvement tout en écoutant à la fois le rythme de son chant intérieur.
En cela on ne peut être indifférents à la différence tant celle-ci est source de richesse au sein d’un groupe, d’une société de nos cultures.
Il existe des corps couverts qui racontent beaucoup et des corps offerts qui ne dévoilent rien…
Que pouvons-nous faire de notre capacité à vivre notre relation aux autres sans les mots, sans la parole mais en toute sensibilité, voire en toute "sensualité" ?
L’ouverture, la tolérance, la curiosité et le respect de l’autre dans sa différence sont autant de valeurs inscrites dans la société qui préoccupent et interrogent cet art en les portant à travers un espace et une énergie qui nous rapprochent.
Les corps sont terriblement absents aujourd'hui, car souvent assis bien trop longtemps, sans conscience d’eux mêmes, voire sans vie, sans carburants, sans étincelles. Des corps absents à eux-mêmes et absents aux autres...
Être soi, être à soi, être ensemble, et pourquoi pas « faire ensemble »?
Et ce faire ensemble est ce que j’ai proposé aux participants durant le fil de cette journée sur la laïcité à l’ISSM de Mulhouse à travers de courtes ponctuations corporelles mettant en jeu le regard, le toucher et le mouvement partagé. Créer du lien par l’art et permettre de modifier ses perceptions, ses points de vues, sa relation aux autres.
Voir, participer, jouer, donner, recevoir, toucher, danser ensemble en musique et à l’écoute dans une respiration commune.
Voici un exercice réalisé lors de la journée d'étude sur la laïcité, à Mulhouse en Octobre 2017.
« La musique fait partie de ma vie depuis mon enfance, elle fut pour moi source d’émancipation et forme d’expression vers un dialogue avec mes parents ».
Dorian Delaunay a voulu permettre, par son parcours d’animateur (du BPJEPS au DEJEPS) cette forme d’expression aux habitants du quartier de la Pépinière à Belfort.
La culture est plus particulièrement la musique est source de rencontres, d’échanges et de partages. Au départ, une bande d’ados qui évoque les manques de moyens, qui a envie de sortir de la routine et de prendre la route avec des familles, des habitants du quartier de la Pépinière. Une Web série est née dans laquelle chacun et chacune fut acteur lors des tournages.
D’un groupe de potes, à un collectif de quartier, Dorian a accompagné cette dynamique d’initiatives culturelles.
L’existence du projet « FIMU des Quartiers » fut l’opportunité d’essaimer et de faire éclore les capacités d’agir sur trois autres quartiers de Belfort : Résidences, Jean Jaurès et Les Glacis.
40 personnes (enfants, adultes et personnes âgées) se sont épanouies ensemble durant 4 samedis du mois d’avril 2018 :
Des liens entre des habitants de différents quartiers Belfortains se sont créés et une volonté collective de poursuivre l’aventure est née.
Hervé Sellier
Cet Article est issu de la publication "Un coup d'essai", réalisé par Trajectoire Ressources et Trajectoire Formation dans le cadre de la formation continu, "Participer et faire participer".
Propos recueillis par Guillaume Guthleben :
Cette interview a été réalisé dans le cadre de la formation continue "Participer et faire participer" au près de Agathe Verhille, une des participantes.
Peux-tu nous dire en quelques mots en quoi consiste ton travail ?
Je travaille à l’association Les Ateliers Nomades à Autun. Nous sommes une équipe de 4 salariés et menons ensemble des projets pour cultiver la rencontre, le mieux vivre ensemble et le développement local participatif. Nous travaillons sur différentes thématiques : les sports de nature, la mobilité douce, l’environnement, le mieux-vivre ensemble. Mon travail consiste donc à chercher des financements (subventions, appels à projet...), mobiliser et rencontrer les habitants, faire le lien avec des partenaires, développer la communication, réaliser les actions.
Est-ce qu’on peut dire du coup que la participation est au coeur de tes pratiques et des projets que tu développes ?
« La participation » est un point essentiel à nos projets. Sur la thématique sport de pleine nature nous allons nous adresser aussi bien aux touristes qu’aux habitants. Le lien avec les touristes est moins participatif que les actions que nous menons en direction des habitants (sport nature et autres thématiques). Nous trouvons essentiel de développer le « pouvoir d’agir » en laissant une place aux habitants par la participation.
Il manquerait quoi si les actions n’étaient pas participatives ? Ou ça changerait quoi ?
La plupart de nos actions se font en direction des habitants des quartiers. Pour une meilleure appropriation et pour que les habitants trouvent leur place il est nécessaire de les intégrer au début de la démarche. Nous ne pouvons pas choisir pour eux car ce sont bien eux qui savent ce dont ils ont besoin et envie. Notre objectif est de concrétiser ses envies et favoriser un vivre ensemble. Ne pas faire « à la place de... » mais « avec ».
Tu peux nous donner un exemple d’un projet que tu trouves / as trouvé réellement participatif ?
Cette année nous avons mis en place un nouveau projet : ouvrir un lieu participatif sur le quartier de Saint Pantaléon. Il y a eu plusieurs étapes à ce projet. Tout d’abord une grande mobilisation en faisant du porte à porte, des rencontres en pied d’immeuble et des réunions directement dans le lieu participatif que nous avons nommé avec les habitants « le Cocon ». Dans ce lieu, les gens peuvent se retrouver pour discuter autour d’un café, définir des envies d’activités et voir comment les mettre en place, réaliser des actions et projets avec et pour les habitants.
Qu’est-ce que cela t’apporte ce contact concret et direct avec les habitants ? Qu’as-tu découvert/appris de cette manière de faire ?
Le fait de prendre le temps de discuter avec les habitants, cela nous permet de créer un climat de confiance. Grâce au Cocon nous avons rencontré de nouvelles personnes qui étaient isolées et quand on prend le temps de les écouter et les mettre à l’aise alors elles osent ensuite s’impliquer et trouvent leur place au sein des projets. Je me suis aperçue qu’on a souvent envie de tout « cadrer » alors que parfois cela se fait naturellement. Un exemple très simple au Cocon : on voulait établir un fonctionnement pour savoir comment les personnes participent à l’achat du café, thé, vaisselles... Et finalement sans rien dire cela s’est fait naturellement. Les personnes amènent des gâteaux, café, et vaisselles. On va mettre parfois de l’énergie sur une occupation qui finalement n’en est pas une pour eux. En discutant avec eux, on comprend au fur et à mesure leurs occupations et priorités.
Peux-tu nous dire les principales difficultés que tu rencontres dans des projets participatifs ?
La participation demande une grande mobilisation en continu. Cela demande beaucoup d’énergie parfois pour peu de personnes à la fin. Mais le résultat ne se résume pas au nombre de personnes. Il est parfois difficile pour les habitants de participer, s’impliquer, donner son avis, car ce n’est pas habituel. Nous avons aussi beaucoup de difficultés à toucher tous les publics comme les jeunes de 18- 30 ans et les hommes. Dans la plupart de nos actions participatives, nous retrouvons les enfants, femmes et personnes âgées. Les difficultés peuvent aussi être le manque de cohérence entre le travail de participation fait avec les habitants et les décisions prises par la Ville.
Même pour une action qui a peu mobilisé, avez-vous l’habitude d’informer plus largement sur ce qui a été fait ou réalisé ? Autrement dit, ceux qui ne se sont finalement pas mobilisés ont-ils la possibilité de se rendre compte que des choses sont possibles ?
Nous essayons au maximum de varier la mobilisation (internet, affiche, journal, porte à porte), parfois on touche de nouvelles personnes. Cela demande beaucoup de temps et d’énergie. Nous essayons aussi de parler de toutes les actions. Par exemple si une personne vient sur un projet comme les jardins partagés, nous lui parlons aussi des autres qui existe (Cocon, atelier vélo, sport nature...) suivant l’échange. Nous faisons beaucoup d’affichage dans chaque entrée d’immeuble du quartier pour chaque nouvelle action. À ce moment les gens, s’ils prennent le temps de voir les affiches, voient ce qu’il ce passe sur leur quartier. Après nous sommes conscients que c’est le bouche à oreille qui marche le mieux et que nous n’arriverons pas à mobiliser tout le monde.
Du coup, cela ne vous incite-t-il pas à réaliser des projets qui seraient moins dépendants de décisions des élus ? Si oui, aurais-tu un exemple ?
Non, cela nous incite pas à faire des projets moins dépendants car la Ville d’Autun reste un partenaire avec qui nous travaillons régulièrement car nous échangeons beaucoup avec les structures des centres sociaux. Et avec la mise en place du conseil citoyen sur le quartier, la Ville prend aussi ces responsabilités au niveau de la participation.
Qu’est-ce que tu as trouvé d’intéressant et/ou d’original dans le cycle “ Participer et Faire participer ” ?
La formation “Participer et Faire participer“ m’a permis de prendre du recul sur mon travail et d’échanger avec d’autres personnes sur leurs propres expériences et les miennes. Cela m’a permis de prendre le temps de décortiquer un projet et de comprendre ce qui fonctionne bien ou moins bien et pourquoi.
Peux-tu donner un exemple de quelque chose que tu as abordé différemment dans ta pratique suite à la formation ?
Nous avions pris l’habitude de consulter les habitants mais c’était souvent difficile de passer à l’étape suivante. Nous avons donc pris le temps de « cristalliser » les informations avec les habitants (une étape qui a souvent été oubliée auparavant). Grâce à la formation, nous avons eu des outils concrets que j’ai mis directement en oeuvre après comme les rituels de démarrage pour mieux se connaitre ou évaluer la température du groupe.
Quel talent personnel penses-tu ne pas mettre suffisamment au service des démarches participatives que tu animes ?
Je ne pense pas mettre suffisamment en avant mes compétences d’animation de réunion lié à ma créativité. J’apprécie beaucoup d’inventer ou de chercher des outils existants de techniques d’animations pour dynamiser une réunion, rencontre. Par faute de temps ou « d’habitude de réunion » je le mets moins en avant sur nos démarches participatives.
Peux-tu partager une parole d’habitant que tu as entendue récemment et qui t’a interpelée ?
Récemment, une habitante (que nous avons rencontrés grâce au Cocon) a demandé s’il était possible de faire un petit repas de Noël au Cocon. Au lieu d’être chacun seul chez soi, ils ont prévu de se retrouver le 24 décembre. À travers cette demande, l’équipe, les partenaires et moi avons été touchés car nous nous apercevons que les habitants se sont appropriés le lieu du « Cocon » pour se retrouver. Un pari que nous n’étions pas sûr de réussir aussi rapidement, reste à maintenir cet état d’esprit.
Peux-tu expliquer ce qu’est le Cocon ?
Le Cocon est le nom du nouveau lieu participatif que nous avons ouvert sur le quartier prioritaire. C’est un lieu pour les habitants. On a demandé à chacun ce qu’ils avaient envie de faire et comment ils pouvaient s’impliquer. C’est un lieu de vie pour favoriser le mieux vivre ensemble et le pouvoir d’agir. Tout est à construire avec les habitants. Des ateliers se sont mis en place parfois par des prestataires et parfois par des habitants qui proposent de partager une passion, un talent. Le lieu permet aussi de prendre le temps de discuter entre habitants autour d’un café.
Comment expliques-tu que cette dynamique collective fonctionne ?
La dynamique fonctionne car nous avons déjà beaucoup travaillé en amont sur la mobilisation avec les partenaires (porte à porte, gouters en pied d’immeuble, crieur public, affiches... ). Finalement, les gens ont envie de partager des choses ensemble mais parfois ils n’osent pas, ou n’ont pas de lieu référencé. On n’a aucun doute sur la volonté des gens du quartier de vouloir partager des moments ensemble. La dynamique fonctionne car c’est l’engouement de l’ouverture du lieu. Maintenant, il faut réussir à maintenir cette dynamique. Il faut réussir à impliquer de plus en plus les habitants dans l’animation de ce lieu (comme avoir plus d’ateliers animés par des habitants, établir un « règlement intérieur », ...). Il ne faut pas que les gens se lassent et ne trouvent plus leur place. La participation, cela reste un travail
continu.
Pour une danse en partage
Se laisser aller à danser les yeux fermés dans une salle obscure ou encore aveuglés par les effets lumineux des stroboscopes. Ressentir la présence de l’autre, dans sa différence et en apprécier la proximité. Être ensemble, dans un même élan d’énergie. Vibrer, à l’infini, à l’intérieur de la complexité de notre sensibilité. Être emporté…
Notre société a tendance à réduire la danse à une activité secondaire, un divertissement. Pourtant, son importance dans l’équilibre individuel et social peut être déterminante. Aujourd’hui, les pratiques amateurs et collectives connaissent une importante recrudescence, mais trop de gens pensent encore que la danse est réservée aux seuls danseurs, trop d’hommes considèrent que c’est une activité pour femmes. La plupart des personnes âgées imaginent qu’elle ne concerne que les jeunes, sans parler des handicapés qui n’osent pas y aller sous prétexte qu’il faudrait un corps agile et exercé
La question du vivre ensemble se pose. Comment sortir de l’inquiétude face à l’autre (l’étranger, le vieux, le jeune de banlieue, l’exclus, le pauvre, l’handicapé, le malade…) sauf à trouver avec lui une commune mesure, quelque chose à partager au-delà de nos origines sociales et ethniques ? La danse peut elle aider à remplir cet office ?
Danser ensemble, c’est emprunter un chemin qui peut nous libérer de notre individualité, nous disposer à faire société, nous rééquilibrer en honorant les deux pôles de notre identité, le collectif et l’individuel. Danser nous met en résonance les uns les autres, apaise notre désir paradoxal de dire « nous » en préservant le « je ». On y rejoint l’universel sans quitter le particulier. Danser nous élève au dessus de nos limites, nous décentre de notre « moi », nous donne accès à un monde plus essentiel dont chacun de nous est une expression singulière. Ephémère et impalpable, la danse est le plus intime et le plus personnel des arts puisqu’elle exige l’engagement de tout le corps. D’où sa difficulté d’approche et l’hésitation de beaucoup à oser y entrer. Pourtant, cet art touche à l’enchantement du sensible, à l’essence du divin, au mystère, et à notre nature. Le chorégraphe cherche à mobiliser différentes compétences du corps. Celui du danseur est spécialisé. Il réunit un ensemble de savoir-faire susceptible de répondre aux besoins et au style de chaque créateur. Impliquant une grande virtuosité, le travail du corps est alors très technique, centré sur la possibilité d’exécuter certains mouvements. Si différents chorégraphes raffolent de ces jeux de technicité, d’autres se penchent sur des états plus sensibles, humains, généreux avec le souci d’offrir au public des sources d’émotions. Le danseur n’est pas seulement un exécutant, un virtuose. Il doit donner au corps les moyens de se ressourcer et à l’esprit une attention l’invitant au merveilleux de l’instant pour découvrir son chant intérieur, source de son émotion. Dans le perfectionnement de ces sensations il progresse dans sa connaissance et augmente ses moyens d’expressions.
Une métamorphose, une intelligence physique où le bonheur de danser véhicule.
Dans mon parcours d’artiste chorégraphique, j’ai traversé différents projets pour amateurs. Un en particulier me laisse une profonde empreinte. Un projet régénérant qui montre que l’art est à la portée de chaque individu, qu’il se nourrit de la vie et permet à chacun de se sentir investi d’un nouveau rôle actif. Réunir un danseur et une personne qui ne l’est pas permet d’apprendre de l’autre, à l’autre et d’avancer vers un nouveau chemin. Made in …série, est cette oeuvre. Pièce participative pour 99 amateurs. Coréalisée par la chorégraphe Joanne Leighton et cinq danseurs professionnels complices, animés par ce même désir d’expérience autre, de mise en commun d’un savoir spécifique et par l’envie de quitter un entre-soi dont la danse est trop souvent victime. Nourrir et se nourrir.
Made in Strasbourg, Metz, Charleroi, Paris, Belfort, Oldenbourg, Dijon, Freiburg, Nancy , Saint Etienne du Rouvray, Vesoul, lycées, Perth. Couleurs de peaux, langues étrangères, cultures se mélangent avec une facilité déconcertante et prouve que l’art est un réel vecteur de ralliement des populations.
À l’heure d’une grande individualisation, il semble pertinent d’interroger l’ensemble, le commun, ce qui rassemble dans les perceptions et les sensations, de questionner ce que fonde l’homogène et l’hétéroclite, le singulier et le pluriel, l’unisson et le partage. En ce sens, ce projet permet d’encourager plusieurs centaines de personnes à participer à un événement chorégraphique entièrement connecté à leur ville, leur ressemblant et les rapprochant. Made in… se situe dans la rencontre entre des pratiques sociales du corps en mouvement, explorant en les défaisant, les articulations entre amateurs et professionnels, entre spectateurs et danseurs.
Destiné à être présenté dans l’espace public, Made in… se joue des espaces et avec l’espace qui est un de ses principaux composants. Activé par l’effet de masse des participants qui le module, le déforme, le compresse ou le disperse, il devient un objet architectural mouvant. Altérer le réel en y introduisant des propositions artistiques pour en modifier la perception. Basé sur des actions empruntées aux gestes quotidiens, l’acte banal de marcher, s’allonger, courir, s’aligner, se regrouper se mue en une proposition étrange par un principe de contamination du mouvement, de respiration ajustée au rythme de chacun. Gestuelle sobre, essentielle, évidente comme une volée d’oiseaux qui change de direction en plein ciel. L’effet produit presque anodin, et pourtant poétique traverse nos corps en mouvement et entraine derrière lui une constellation de particules de sens, qui aussitôt éveillée, s’apprête à aller vers d’autres intentions. Aucun repère musical, aucun compte. Juste l’écoute commune du groupe.
Les oeuvres chorégraphiques en nourrissant notre exigence et notre pensée nous conduisent vers une compréhension du monde plus détaillée et précise. Elles se déposent dans le secret des corps, flottent dans les mémoires silencieuses et intangibles. Elles ouvrent de nouveaux horizons de liberté, forgent parfois des relations solidaires pour la vie. Dans les corps comme dans les coeurs.
Marie-pierre Jaux
Juste avant l’Assemblée Générale de Trajectoire Formation le 5 mai 2016, nous avons souhaité profiter de cette occasion spéciale. Occasion spéciale à double titre, puisqu’elle voyait le départ du directeur « historique » de Trajectoire Formation, Jean-Jacques Sombsthay et la prise de fonction en tant que directrice de Claire Pfauwadel.
Nous avons donc réuni ces deux « personnages » pour une interview croisée, menée par Alain Chanard, que nous vous proposons…
Quand Claire me propose de m’occuper de l’organisation de la journée d’étude des cafés du partage de l’APF, je dis tout de suite « oui » car l’idée d’une rencontre entre parents d’enfants en situation de handicap et des professionnels du handicap m’enthousiasme dans un premier temps.
Pour comprendre mon intérêt, un mot tout d’abord des cafés du partage : le café du partage est né en 2011. Il réunit des parents d’enfants en situation de handicap, souhaitant échanger autour de questions d’éducation ou tout simplement partager leur expérience de parents faisant face à toutes les situations de la vie. Des professionnels sont invités pour apporter si besoin un éclairage technique ou une expertise sur une question. Les participants au café du partage vont progressivement affirmer une volonté de croiser les regards pour parvenir à apprendre les uns des autres, qui du parent adulte –éducateur 1 de son enfant, qui du professionnel éducateur spécialisé, qui de l’expert médecin –rééducateur, pour accompagner cet enfant différent dans son devenir de futur homme- citoyen. Professionnelle du champ du handicap depuis quelques décennies, cette initiative agit en moi comme une piqure de rappel que les parents d’enfants en situation de handicap ont en eux cette capacité et cette volonté à agir par eux-mêmes, à trouver des solutions en dehors des services institués, à créer, à me surprendre.
Je sais qu’il est bon de ne pas les limiter dans une position de demandeur d’aide d’accompagnement et qu’ils ont des choses à dire. Je sais aussi qu’il est difficile dans un cadre institutionnel de recueillir leurs points de vue, leurs envies, leurs rêves même… les enquêtes de satisfaction adressées aux familles sont comme leur nom l’indique, un outil de mesure de satisfaction, et ne représente qu’un écho lointain à ce qui les mobilise profondément. Cette journée va me permettre d’apporter de l’eau à mon moulin de professionnelle désireuse de me conformer à la loi 2002-2, laquelle, ne l’oublions pas, place la famille au cœur du projet d’accompagnement de leur enfant.
Dans un deuxième temps, l’intitulé du thème heurte mes oreilles : socialisation et comportements déviants. Pourquoi les parents mettent-ils en parallèle la notion de socialisation de l’enfant ou l’adulte en situation de handicap, renvoyant à une capacité intrinsèque à la condition humaine et le comportement déviant, qui pour moi, renvoie à des notions de sociologie de la déviance et à la délinquance ?
J’entre de plein fouet dans le projet de cette journée. Le préalable pour croiser les regards, accepter les mots des parents, les comprendre, au sens littéral du mot, les prendre avec moi et me dégager de mes références théoriques … aller au-delà de mes frontières et m’inviter dans un autre univers, nourri par une autre sémantique.
Cette journée nous permet avec l’éclairage conceptuel de Christine Mayer (méta-pédagogue) de :
- définir et de distinguer deux notions importantes souvent utilisées l’une pour l’autre :
La socialisation qui est l’apprentissage de la capacité à entrer en relation sociale avec les autres et d’intégrer les codes de communication communs et les codes de société. Elle implique la relation de l’individu à son environnement
La sociabilisation considérée comme un processus permettant une bonne socialisation.
- d’identifier les différents besoins de l’humain selon la pyramide de Maslow
- de comprendre les comportements déviants, comme la conséquence d’une absence de sociabilisation et de socialisation et comme la résultante d’un besoin non couvert.
- de découvrir des techniques et méthode d’intervention pour faire évoluer les comportements déviants.
Des temps d’atelier sont l’occasion d’échanges féconds, et nous amène à réfléchir sur les facteurs de réussite dans le processus de socialisation et à l’inverse les freins et les blocages, de comprendre et décrypter les comportements déviants et d’envisager des pistes d’action concrètes et de réflexion.
Les points émergents de nos échanges sont :
- l’importance du rôle et de l’impact de l’environnement dans l’apparition des comportements déviants et dans les possibilités de résolution
- l’importance de la reconnaissance des besoins, envies de la personne en situation de handicap comme moteur de l’accompagnement
- le comportement déviant, envisagé non pas uniquement dans un rapport à une norme sociale mais dans la perspective d’un chemin dévié de sa trajectoire initiale.
- de nouvelles fonctions ou modalités d’accompagnement à proposer aux personnes en situation de handicap : les coachs professionnels, le dispositif de l’emploi accompagné2.
Cette journée aura rassemblée une vingtaine de personnes alors que j’en imaginais une cinquantaine au moins, au regard de la thématique … Peu de parents, assez peu de professionnels. Quand en est-il ? Un manque de communication, un manque d’intérêt ? Parents et professionnels ne seraient-ils encore pas tout à fait prêts à se côtoyer en dehors des espaces-temps institués par les services ou établissements ? Est-ce à dire que l’un comme l’autre n’auraient pas encore saisi ce qu’ils peuvent mutuellement s’apporter ? Peut-être pas, je vais vite en besogne. Il y a l’histoire de changer ses habitudes, d’accepter de se regarder, de s’envisager au -delà du rôle social, au –delà de la catégorie, parents- professionnels- experts.
Ces rôles sociaux enferment tout un chacun dans des comportements attendus. La relation parents-professionnels ou parents-experts est marquée du sceau de la domination et du conflit, car l’expert est par définition et assignation de rôle celui qui sait. Je ne supporte pas en tant que mère le comportement d’un médecin qui va me prendre de haut et m’imposer sa vérité et vous, n’avez-vous jamais éprouvé de l’énervement ou de la colère face à un spécialiste inabordable tant dans ses paroles que dans ses actes ? Accepter de partager, c’est d’abord et avant tout accepter de construire une relation de réciprocité, une relation de don –contre –don telle que l’a définie Marcel Mauss. Je te donne, tu reçois. Le fait de recevoir te place en obligation de redonner. Je reçois de toi et je te redonne et ainsi de suite. C’est selon Marcel Mauss ce qui permet de garantir la paix et de sortir du conflit ou de la crise. … une autre façon d’envisager le processus de socialisation !
Quoi qu’il en soit, je retire de cette journée la fécondité de nos échanges, le plaisir à partager son expérience de parents ou de professionnels, à se raconter en dehors de la question du projet de l’enfant et de ses contraintes (administratives, institutionnelles), d’écouter ensemble les propos de Christine Mayer, de découvrir ensemble des techniques ou des outils pour faire face aux comportements déviants. Oui, c’est possible que chacun à la place qu’il occupe donne et reçoive de l’autre.
Car face à la crise de l’enfant ou de l’adulte en situation de handicap, professionnels et parents en sont au même point, trouver une solution de sortie de crise et assumer le regard et les réactions de l’environnement et continuer à avancer avec cet enfant ou cet adulte différent.
Et pour conclure, à l’heure de la désinstitutionnalisation, de ce nouveau projet sociétal de faire institution hors les murs, il me paraît plus que nécessaire de continuer à créer des espace-temps favorisant l’échange et la construction de savoirs collectifs, fruits des expériences et des savoirs de chacun… parents, professionnels de terrain, professionnels experts.
Sylvie Molina
1 En référence à l’ouvrage de Philippe Gaberan.- être adulte éducateur c’est… éditions Eres
2 www.emploi-accompagné- le dispositif de l’emploi accompagné : loi n°2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels
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Au cœur de Belfort, je vais à l’école, vers 15h30 ce 5 mars 2018…
J’entre par l’atelier de sculpture et découvre des personnes attablées avec chacune une motte d’argile devant elle. Thierry invite chacun et chacune à la création, à la construction. Les mains modèlent et se lissent. Les regards sont d’enfants. Du toucher naît la détente. Passes à ton voisin…
Passée une porte, je suis enveloppé d’intonations de voix. Claire propose de chanter son prénom. Produire des modulations et mettre des couleurs aux sons, l’espace résonne de toutes les personnalisations.
Au premier étage, le silence est d’or, concentrations. De la pointe du fusain, les contours apparaissent sur les supports en papier. Cyril conseille d’observer le modèle sous différents angles et de changer de main… Ma main droite est-elle gauche ou ma main gauche maladroite ?
Dans la salle du fond à gauche, des corps se meuvent. Mare Pierre incite à la mise en rythme des individus vers un collectif en harmonie. Vivre la relation à l’autre, physiquement, par le regard, dans un espace commun.
A l’autre bout du bâtiment, Antoine donne l’air. Pour être en mesure d’écouter. Rythme, harmonie et mélodie, la musique peut se vivre en groupe.
Deuxième étage, le cercle des poètes est formé par Fabien. Chacun et chacune expriment ses émotions sur le papier. Traquer des sensations et braconner son imagination, les images sont ensuite évoquées en différentes expressions.
Je quitte l’école vers 20h, les sens en ébullition.
Hervé Sellier
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Une occasion de pratiquer les techniques d’animation
Les stagiaires de la formation BAPAAT, sont amenés au cours de l’année à exercer grâce à deux situations de stage pratique. Le but est qu’ils puissent rencontrer différents publics structures et contextes. De plus, partant du principe que toute pratique est bonne à prendre, le groupe a été amené à organiser une journée interpromotion pour les autres stagiaires présents à la Maison des Métiers de la Ville. L’objectif étant de profiter du contexte de la formation pour pouvoir appliquer les techniques apprises depuis le début de l’année (livre, jeux, écriture et lecture) mais aussi apprendre à les adapter en fonction de la situation (lieu, météo, public...).
Une expérience pour les stagiaires
C’est les stagiaires eux-mêmes qui se sont chargés de la préparation de la journée :
« L’expérience de vivre un projet en commun nous a permis de créer une cohésion de groupe, et aussi d’apprendre à s’adapter dans le contexte d’un projet »
Ils ont proposé aux usagers de la MMV de participer à une après midi basés sur les thèmes du frisson et des monstres. Entre les casses têtes et les jeux autour de l’odorat, les stagiaires ont pu s’essayer à un jeu de piste ou tenter de reconstruire une maison à l’aide de bonbons, sans se servir de leur main !
« Ce qui était cool c’était aussi de pouvoir échanger avec les autres groupes de Trajectoire, de prendre le temps de parler. »
Photographies : Mohamed Afkir - Hervé Sellier
Je referme mon bloc-note et range mon stylo.
Depuis deux heures Amina, présidente, et Chahrazed, salariée, me parlent de leur association « Des Racines et des Feuilles ». Initié en 1999 par un groupe de femmes se posant des questions sur l'éducation de leur(s) enfant(s), ce collectif de « mères françaises et pas françaises » s'est structuré en association en 2002. Le projet, conforté et enrichi au fil des années, est à la fois simple et puissant : œuvrer dans le champ éducatif et social auprès des enfants et des jeunes pour qu'ils deviennent citoyens et construire du vivre ensemble sur le quartier à travers des projets à destination de tous.
Cela fait donc plus de dix-huit ans que ces femmes et mères se questionnent sur le thème « être ici et venir d'ailleurs ». Le nom de leur association fournit un début de réponse : les racines pour l'histoire, la culture, et les feuilles pour l'après, l'avenir. L'avant n'est nullement renié mais nourrit au contraire ce qui se déploie.
Ces habitantes vivant pour la plupart dans un quartier d'habitat social de Besançon sont confrontées à bien des problèmes dans bien des domaines. Dès leurs premières rencontres, en 1998, il leur est toutefois apparu évident qu'une de leurs priorités devait être de contribuer collectivement à l'éducation de leurs enfants en veillant à ce qu'ils grandissent en connaissant leurs cultures d'origine. Elles estimaient également qu'elles devaient « donner à la société » car, comme dit aujourd'hui Amina, « nous ne voulions pas être considérées comme des boulets ».
Pour Amina, Chahrazed et les autres militantes de l'association, pas question, « d'être étrangères toute leur vie ». Elles voulaient être LÀ et LÀ : LÀ en tant que femme de culture musulmane et LÀ en tant que citoyenne. Pour elles, il n'y avait pas, et il n'y a toujours pas, d'ambiguïté entre ces deux LÀ et c'est la raison d'être de l'association Des Racines et des Feuilles. Amina explique cependant que cette double position a toujours été compliquée à faire comprendre à leurs différents interlocuteurs.
Ces soupçons sont encore davantage exacerbés dans le contexte actuel, notamment parce que les femmes qui sont impliquées dans Des Racines et des Feuilles portent, pour certaines, le foulard ce qui les rend suspectes de « communautarisme religieux ». Amina, en tant que présidente et comme toutes les autres femmes de l'association, se refuse à tout discours militant sur le foulard. Pas question donc de s'embarrasser de la question du religieux et de ce soi-disant communautarisme dont certains les accusent, et encore moins de tomber dans la victimisation. Leur bataille, c'est le vivre et l'agir ensemble ; leur slogan, c'est « Viens comme tu es ». Les valeurs et principes de l'association sont la liberté de choix, l'égalité, la fraternité et la laïcité.
Pour elles, c'est clair : le foulard n'est pas un problème et elles défendent haut et fort cette position. Leur droit à la différence (et à l'indifférence !) est cependant contesté... au nom d'une certaine conception de la laïcité... Amina évoque ce qu'il y a d'insupportable à être trop souvent confronté à des regards désapprobateurs ou hostiles et aux émotions irrationnelles que peut provoquer le simple fait d'être soi et notamment par le biais du vestimentaire. Elle n'admet pas que l'exercice d'une liberté constitutive de la République, à savoir la liberté d'opinion et de croyance (la laïcité dans le vocabulaire du moment ), puisse fonder la suspicion de quelques associations du quartier, de certains habitants ou personnalités publiques.
Pour Amina, la laïcité est mise « à toutes les sauces » et certaines utilisations politiciennes de ce principe entravent fortement un vivre ensemble déjà bien malmené. Elle est consternée par les contre-sens et les amalgames qui tendent à rendre la question de plus en plus confuse. Mais, explique Amina « nous sommes habituées à ramer à contre-courant » et nous sommes plus que jamais déterminées à faire vivre une laïcité respectueuse de la liberté de pensée et favorable à la cohabitation de toutes les opinions et sensibilités.
Je n'écris plus et Amina conclut : « mais va-t-on y arriver un jour ? »
Texte écrit à partir de la rencontre avec Amina Benaddi et Chahrazed Karoui-M'Barek, en présence de Murielle Taïeb (autre membre fondatrice de l’association) et de Mouin Taïeb, bénévole à l'association.
Interview réalisée le 9 décembre 2016 par Colette Chagnot
Et pour poursuivre ...
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